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INTRODUCTION.


besoin, pour qu’elles aient un sens, une signification, d’un certain usage in concreto, c’est-à-dire d’une application à quelque intuition qui nous donne son objet. Mais comment une intuition de l’objet peut-elle précéder l’objet même ?


§ IX.

Si notre intuition devait être de telle sorte qu’elle représentât des choses telles qu’elles sont en elles-mêmes, il n’y aurait aucune intuition a priori ; elles seraient toutes empiriques. Je ne puis en effet savoir ce qui est contenu dans l’objet même qu’autant qu’il m’est présent et donné. Sans doute on ne comprend pas encore alors comment l’intuition d’une chose présente doit me la faire connaître telle qu’elle est en soi, puisque les propriétés de cette chose ne peuvent passer dans ma faculté représentative ; mais en supposant le fait possible, il n’y aurait cependant pas lieu à une intuition a priori, c’est-à-dire avant que l’objet me fût représenté ; condition sans laquelle le rapport de ma représentation à l’objet est inconcevable, si ce n’est par inspiration. Il n’y a donc qu’une seule manière dont mon intuition puisse précéder la réalité de l’objet, et se constituer comme connaissance a priori, c’est qu’elle ne contienne que la forme de la sensibilité, qui précède dans mon sujet toutes les impressions réelles par lesquelles les objets peuvent m’affecter. Je puis en effet savoir a priori que des objets des sens ne sont perçus que suivant cette forme