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PROGRÈS DE LA MÉTAPHYSIQUE


et quelle connaissance peut produire en lui ce qu’on appelle spécifiquement sa raison pure. Car si, par une raison pure d’un être en général, nous entendons la faculté de connaître les choses indépendamment de l’expérience, c’est-à-dire sans des représentations sensibles, on ne décidera point par là de quelle manière en général une semblable connaissance est possible en lui (par exemple en Dieu ou dans quelque autre esprit au-dessus de l’homme), et le problème reste alors indéterminé.

Au contraire, en ce qui regarde l’homme, toute sa connaissance a lieu par notions et intuitions. Chacune de ces deux choses est à la vérité une représentation, mais pas encore une connaissance. Se représenter quelque chose par des notions, c’est-à-dire en général, s’appelle penser, et la faculté de penser est l’entendement. La représentation immédiate du particulier est l’intuition. La connaissance par notions s’appelle discursive ; par intuition elle est intuitive. En fait, une connaissance requiert ces deux choses réunies, mais elle prend son nom de ce qui provoque dans chaque cas davantage l’attention, comme son principe de détermination. La propriété spécifique de la faculté de connaître, faculté que nous étudierons bientôt plus spécialement, permet de dire si ces deux sortes de connaissances sont empiriques, ou si elles peuvent être aussi des modes de représentation pures. Car l’intuition conforme à une notion donne l’objet ; sans elle l’objet est simplement pensé. Par cette simple intuition sans notion, l’objet est à la vérité