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INTRODUCTION.


se liquéfier, une autre se montrait aussitôt à la surface, et était toujours recueillie avec le même empressement par quelques-uns, quand d’autres, au lieu de chercher au fond la cause de ce phénomène, s’estimaient des sages parce qu’ils se moquaient de la peine inutile que prenaient les premiers.

La différence essentielle de la connaissance mathématique pure avec toute autre connaissance a priori, c’est qu’elle doit procéder non par notions, mais toujours par la construction des notions (Critique, t. II, p. 314). Comme elle doit par conséquent sortir, dans ses propositions, de la notion pour aller à ce qui contient l’intuition correspondant à cette notion, ses propositions ne doivent jamais s’obtenir par une décomposition des concepts, c’est-à-dire analytiquement ; elles sont donc toutes synthétiques.

Je ne puis donc pas laisser sans le signaler le dommage porté à la philosophie par la négligence de cette observation d’ailleurs facile, et d’apparence insignifiante. Hume pensant que la vocation d’un philosophe est de jeter ses regards sur tout le domaine de la connaissance pure a priori, où l’entendement humain croit avoir de si vastes possessions, en détacha inconsidérément toute une province et de beaucoup la principale, celle des mathématiques pures, persuadé que sa nature, et pour ainsi dire sa constitution politique repose sur de tout autres principes, à savoir sur le seul principe de contradiction, et quoiqu’il n’eût pas opéré la division des propositions d’une manière aussi formelle et générale, ou sous la dénomination propre,