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objet en intuition, conformément à la notion. De cette manière il prouva la réalité de la règle même, et par là même celle de cette notion pour l’usage de l’imagination. S’il eût eu à trouver comment un tout peut être composé de monades, il eût avoué, parce qu’il savait qu’il n’avait pas à chercher dans l’espace de pareils êtres de raison, que l’on n’en peut absolument rien dire, parce que ce sont des êtres sursensibles, qui ne peuvent s’offrir qu’en pensée, et jamais, comme tels, en intuition. — Mais M. Eberhard, voyant que ces êtres ne sont trop petits que pour le degré de pénétration de nos sens, ou leur multiplicité en une représentation intuitive donnée trop grande pour le degré actuel de l’imagination et pour sa faculté compréhensive, veut qu’ils soient des objets non sensibles dont nous devons savoir plusieurs choses par l’entendement. Ce que nous voulons bien permettre encore, parce qu’une telle notion du non sensible n’a rien de commun avec celle qu’en donne la Critique, et comme elle emporte déjà une contradiction dans l’expression même, elle aura difficilement des conséquences.

On voit clairement par ce qui a été dit jusqu’ici, que M. Eberhard cherche la matière de toute connaissance dans les sens ; ce qui est bien son droit. Mais il veut aussi étendre cette matière à la connaissance du sursensible. Il emploie, pour franchir cette difficulté, le principe de la raison suffisante, que non seulement il prend dans son universalité indéterminée, mais où il exige une tout autre espèce de dis-