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Comment M. Eberhard se tire-t-il de cette difficulté ? Par un jeu de mots qui présentent au premier aspect un double sens. Une partie non sensible est tout à fait en dehors de la sphère de la sensibilité ; or est non sensible ce qui ne peut jamais être senti séparément ; et ce qui est simple, dans les choses comme dans les représentations, est dans ce cas. Le second mot, qui doit faire des parties d’une représentation sensible ou de son objet un être de raison, est le simple inimaginable. Cette expression semble lui plaire beaucoup, car il en use très souvent par la suite. N’être pas sensible et cependant constituer une partie du sensible, lui semble à lui-même trop fortement contradictoire pour que la notion du non sensible passe par ce moyen à l’intuition sensible.

Une partie non sensible indique ici une partie d’une intuition empirique, c’est-à-dire de la représentation de laquelle on n’a pas conscience. M. Eberhard ne veut pas sortir des mots ; car s’il en avait donné la dernière explication, il aurait avoué que pour lui la sensibilité n’est autre chose que l’état confus des représentations dans le divers de l’intuition. Si, au contraire, le mot sensible est employé dans l’acception propre, il est évident que quand aucune partie simple d’un objet des sens n’est sensible, cet objet, comme tout, ne peut abso-

    (cette représentation est donc confuse). Ensuite (p. 299), il veut cependant rendre cette notion plus stricte, afin d’échapper aux objections fondées qui l’attendent ; il ajoute donc cette condition, qui est précisément toute à son désavantage, parce qu’il avait voulu montrer des êtres simples comme êtres de raison, et qu’il introduit ainsi une contradiction dans sa propre affirmation.