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sance, mais nullement des objets des sens (des phénomènes), qui sont les seuls objets que nous puissions connaître, et qu’ainsi la réalité objective de cette notion n’est pas du tout prouvée. Il dut donc chercher, même involontairement, ces êtres de raison dans les objets des sens. Comment donc s’est-il tiré de là ? Il a dû donner à la notion du non sensible, par un tour qu’il déguise mal à propos au lecteur, une autre signification que celle qu’elle reçoit non seulement de la Critique, mais de tout le monde en général. Tantôt il s’agit par là de ce qui, dans la représentation sensible, n’est plus senti avec conscience, mais dont l’entendement néanmoins reconnaît l’existence ; telles sont les particules des corps, ou bien encore des déterminations de notre faculté représentative, qu’on ne conçoit pas clairement à l’état de séparation ; tantôt (surtout s’il faut que ces particules soient conçues précisément comme simples) il s’agit de l’inimaginable, dont aucune image n’est possible, qui ne peut être représenté sous aucune forme sensible (p. 171), par aucune figure. — Si jamais on peut reprocher avec raison à un écrivain la falsification d’une notion (non la confusion, qui peut aussi avoir lieu sans préméditation), c’est bien ici. Car par non sensible on n’entend jamais dans la Critique que ce qui ne peut absolument pas être contenu, pas même quant à la plus petite partie, dans une intuition sensible ; et c’est tromper sciemment le lecteur novice, que de lui présenter en place quelque chose d’un objet des sens, parce qu’il ne s’en fait aucune image (par quoi il faut entendre