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là fait le moindre progrès ; et cela par la raison toute naturelle que la science n’existait pas encore, et qu’elle ne peut être faite partiellement, mais que le germe en doit d’abord être entièrement préformé dans la critique. Mais pour éviter tout malentendu, il faut se rappeler ce qui a été dit précédemment, qu’un traité analytique de nos concepts est sans contredit fort utile à l’entendement, mais que la science (de la métaphysique) ne s’en trouve pas plus avancée, parce que ces analyses des notions ne sont que des matériaux qui doivent enfin servir à la construction de la science. Ainsi l’on peut très joliment décomposer et déterminer les notions de substance et d’accident, ce qui est fort bon comme préliminaire pour un usage futur ; mais si je ne puis absolument pas prouver que dans tout ce qui existe la substance reste, que les accidents seuls changent, la science n’a pas avancé d’un point par toute cette analyse. Or, la métaphysique n’a pu jusqu’ici prouver a priori d’une manière satisfaisante ni cette proposition ni la proposition de la raison suffisante, bien moins encore quelque proposition plus composée, appartenant, par exemple, à la Psychologie ou à la Cosmologie, et en général aucune proposition synthétique. Rien donc par toute cette analyse d’effectué, rien d’acquis, point de progrès, et la science, après tant de tumulte et de bruit, en est encore où elle était du temps d’Aristote, quoique les méthodes qui y conduisent, n’eût-on trouvé que le fil conducteur pour les connaissances synthétiques, soient incontestablement supérieures à celles d’autrefois.