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logie, c’est-à-dire en tant que cette expression montre seulement le rapport de la cause suprême à nous inconnue avec le monde, pour y déterminer raisonnablement toute chose au plus haut degré. De cette manière donc on évite de se servir de la propriété de la raison pour concevoir Dieu ; on ne s’en sert que pour concevoir le monde, comme il le faut bien, si l’on veut avoir le plus grand usage possible de la raison par rapport au monde suivant un principe.

Nous avouons donc que l’être suprême, considéré en lui-même, nous est tout à fait impénétrable, et inconnaissable même d’une manière déterminée, ce qui nous empêche, d’après les notions que nous avons de la raison comme cause efficiente (à l’aide de la volonté), d’en faire aucun usage transcendant pour déterminer la nature divine par des propriétés qui cependant sont toujours prises de la nature humaine, et de nous perdre dans de grossières et mystiques notions. Par là nous évitons aussi de noyer la contemplation du monde, d’après des notions de la raison humaine transportées à Dieu, dans des explications hyperphysiques, de détourner cette contemplation de sa fin propre, suivant laquelle elle doit être une étude de la simple nature par la raison, et non une dérivation téméraire des phénomènes physiques, d’une raison suprême. L’expression qui convient à nos faibles notions sera donc : que nous concevons le monde comme s’il dérivait, quant à son existence et à ses déterminations internes, d’une raison suprême ; ce qui nous permet, d’une part, de