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nomènes, et appartient au monde sensible. Prenons pour exemple la notion de l’être suprême.

La notion constitutive du déisme est une notion toute rationnelle, mais qui ne représente qu’une chose, celle qui contient toute réalité, sans pouvoir en déterminer une seule, parce qu’il faudrait pour cela prendre un exemple du monde sensible, auquel cas je n’aurais jamais affaire qu’à un objet des sens, mais point à quelque chose d’entièrement hétérogène, qui ne peut en aucune façon être un objet des sens. Lui attribuerais-je par exemple l’entendement ! Mais je n’ai d’autre notion d’un entendement que de celui qui ressemble au mien, c’est-à-dire auquel des sens doivent fournir des intuitions, et qui s’applique ainsi à les soumettre aux règles de l’unité de conscience. Mais alors les éléments de ma notion seraient toujours dans le phénomène ; je serais ainsi forcé par l’insuffisance des phénomènes, de m’élever plus haut, de m’adresser à la notion d’un être qui est indépendant des phénomènes, ou qui s’y trouve mêlé comme à des conditions de sa détermination. Mais si je sépare l’entendement de la sensibilité pour avoir un entendement pur, il ne reste plus que la simple forme de la pensée sans aucune intuition, forme qui ne peut me servir à connaître quoi que ce soit de déterminé, par conséquent aucun objet. Il faudrait à cette fin concevoir un autre entendement, qui perçût les objets dont je n’ai pas la moindre notion, parce que l’entendement humain est discursif, et ne peut connaître que par des notions universelles. Même résultat si j’attribue à l’être su-