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peuvent jamais être réalisées, servent non seulement à nous montrer les limites de l’usage pur de la raison, mais aussi la manière de les déterminer ; et tel est aussi le but et l’utilité de ces dispositions naturelles de notre raison, qui engendre la métaphysique, comme son enfant de prédilection. Cette procréation, comme toute autre dans le monde, n’est pas due au hasard, mais à un germe primitif, sagement organisé pour cette fin. Car la métaphysique est peut-être plus que toute autre science le fruit de la nature même en nous, dans ses traits essentiels, et ne peut être regardée comme le produit d’un choix arbitraire, ou comme la suite contingente du progrès des expériences (dont elle se sépare entièrement).

La raison, par toutes ses notions et par les lois de l’entendement, qui lui suffisent pour l’usage empirique, par conséquent dans la sphère du monde sensible, n’y trouve cependant aucune satisfaction ; car par des questions qui se reproduisent toujours à l’infini, tout espoir d’y répondre parfaitement lui est ravi. Les idées transcendantales, qui ont pour objet cette perfection, sont des problèmes rationnels de cette espèce. Or, on voit clairement que le monde sensible ne peut contenir cette intégration, pas plus que toutes ces notions qui ne servent qu’à le concevoir, celles d’espace, de temps, et tout ce que nous avons indiqué sous le nom de notions intellectuelles pures. Le monde sensible n’est qu’un enchaînement de phénomènes liés suivant des lois universelles. Il n’a donc pas d’existence en soi, et se rapporte par conséquent d’une ma-