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DE LA VICTOIRE DU BON PRINCIPE SUR LE MAUVAIS

jamais renoncé au droit à la prééminence qui lui revient, en tant que seule croyance réformatrice (seelenbesserndem), et finira certainement par l’affirmer.

Le seul moyen pour cette histoire d’avoir de l’unité, c’est d’être circonscrite à cette partie de l’espèce humaine chez laquelle actuellement la disposition à l’unité de l’Église universelle se trouve déjà amenée près de son développement, puisqu’elle a tout au moins déjà publiquement posé la question de la différence entre la croyance historique et la croyance rationnelle et attribué à la décision de ce point la plus grande importance morale ; car l’histoire des 《 dogmes professés par 》[1] différents peuples, que ne relie entre eux aucune foi commune, ne saurait procurer à l’Église de l’unité. Or on ne peut pas mettre au compte de cette unité le fait que dans un même peuple a pris naissance, à un moment donné une certaine foi nouvelle notablement distincte de celle qui régnait avant, quand même la foi précédente eût contenu les causes occasionnelles de cette production nouvelle. Car il doit y avoir unité de principe pour que l’on puisse rapporter les différentes sortes de croyances qui se sont succédé entre elles aux modifications d’une Église toujours la même, Église dont l’histoire est proprement ce qui maintenant nous occupe.

Il n’y a qu’une histoire qui réponde à ces exigences c’est celle de l’Église qui, dès ses débuts, porte en elle le germe et les principes de l’unité objective de la croyance religieuse véritable et universelle. ― On voit de prime abord que la foi judaïque n’a pas de rapport essentiel avec cette foi ecclésiastique dont nous voulons considérer l’histoire, c’est-à-dire n’offre avec elle aucune unité suivant

  1. Le manuscrit de Kant (cf. E. Arnold, Beiträge zu dem Material der Geschichte von Kants Leben, etc., Königsberg, 1898) contient ce texte : die Geschichte der Salzungen verschiedener Völker, que Vorländer a rétabli dans son édition de la Religion (Leipzig, 1903). Nous avons cru devoir le suivre. A. T.