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DEUXIÈME SECTION

REPRÉSENTATION HISTORIQUE DE LA FONDATION PROGRESSIVE DE LA DOMINATION DU BON PRINCIPE SUR LA TERRE.


On ne peut exiger de la religion sur la terre (au sens le plus strict de ce mot) aucune histoire universelle portant sur tout le genre humain ; car, en tant que fondée sur la foi morale pure, elle n’est pas un état public et chacun ne saurait avoir que la conscience particulière de ses progrès dans cette foi. La croyance d’Église est, par suite, la seule dont il soit possible d’attendre un exposé général historique donné par la comparaison de cette croyance aux formes diverses et changeantes avec la foi religieuse pure toujours unique et immuable. À partir du moment où la foi ecclésiastique reconnaît officiellement qu’elle dépend des conditions limitatives de la croyance religieuse et qu’elle doit s’accorder avec elle, l’Église universelle commence à revêtir la forme d’un État moral gouverné par Dieu et à se rapprocher sans cesse, d’après un principe bien établi, perpétuellement identique pour tous, de la réalisation complète de cet état. ― Il est à supposer d’avance qu’une pareille histoire sera simplement le récit de la lutte continuelle qui se livre entre les croyances de la religion cultuelle et de la religion morale, l’homme étant constamment enclin à placer plus haut la première, en tant que croyance historique, alors que la dernière n’a