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LA RELIGION DANS LES LIMITES DE LA RAISON

mais tout peut être réparé grâce à la liberté publique de penser dont l’intervention est d’autant plus justifiée que c’est seulement parce qu’ils soumettent leurs interprétations à l’examen de tous et qu’ils sont toujours prêts à faire bon accueil à des façons de voir meilleures, que les docteurs peuvent compter sur la confiance de l’Église à leurs décisions.


VII. — La transition graduelle qui fait passer la croyance ecclésiastique â la souveraineté de la croyance religieuse pure est l’approche du règne de Dieu.


La marque de l’Église véritable est son universalité ; et ce caractère se reconnaît à sa nécessité et à son incapacité d’avoir un autre mode de détermination. Or, la foi historique (basée sur la révélation, c’est-à-dire sur l’expérience), n’a pas de portée générale et ne peut atteindre que ceux auxquels est parvenue l’histoire sur laquelle elle s’appuie ; ainsi, du reste, que toute la connaissance empirique, elle contient, non pas la conscience que son objet doit être ainsi et non autrement, mais seulement qu’il est ainsi ; par là même elle implique aussi la conscience de sa contingence. Donc s’il se peut qu’elle suffise à la foi ecclésiastique (dont il peut y avoir plusieurs variétés), il n’y a que la foi religieuse pure, entièrement fondée sur la raison, qu’on puisse reconnaître comme nécessaire et comme étant, par conséquent, la seule qui caractérise l’Église véritable. ― Mais, bien qu’une foi historique (conformément à l’inévitable limitation de la raison humaine) affecte la religion pure comme moyen et comme véhicule, en ayant conscience de n’être que cela, et que cette foi historique, en tant que croyance d’Église, comporte un principe qui la rapproche un peu plus tous les jours de la foi religieuse pure, pour arriver à rendre inutile ce véhicule, l’Église qui