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DE LA VICTOIRE DU BON PRINCIPE SUR LE MAUVAIS

gentes qui doivent changer avec le temps et suivant les circonstances, et qui d’ailleurs ne portent que sur son administration, immutabilité dont elle doit, du reste, contenir déjà en elle-même à priori (dans l’idée de sa fin) les principes certains. (Il faut donc que l’Église ait des lois primordiales officiellement promulguées en prescriptions, comme par un code, et non des symboles arbitraires qui, manquant d’authenticité, sont contingents, sujets à la contradiction et variables.)

Une république morale, en tant qu’Église, c’est-à-dire considérée comme une simple représentation (als blosse Repräsentantin) d’un État de Dieu n’a donc pas de principes, à proprement parler, qui la rendent semblable à un système politique. Sa constitution n’est ni monarchique (avec un pape ou un patriarche pour chef), ni aristocratique (avec des évêques et des prélats), ni démocratique (avec des sectaires illuminés). On pourrait encore, ce serait le mieux, la comparer à une maison (à une famille) que gouverne un Père moral commun invisible, il est vrai, mais représenté par son Fils très saint, qui sachant ce que veut le Père, et uni par les liens du sang à tous les membres de cette famille, leur transmet ses ordres plus clairement et, par suite, les porte à l’honorer en lui et à s’unir de cœur tous ensemble dans une confraternité spontanée, générale et durable.


V. — La constitution d’une Église a toujours à sa base une foi historique (croyance révélée) qu’on peut appeler ecclésiastique et qui trouve en des livres saints ses meilleurs fondements.


La foi religieuse pure est la seule qui puisse fonder une Église universelle, parce qu’étant une simple foi de la raison elle peut se communiquer à tous avec force persuasive ;