médier à l’insuffisance des punitions morales. Lorsque les punitions morales n’ont plus d’effet et que l’on a recours aux punitions physiques, il faut renoncer à former jamais par ce moyen un bon caractère. Mais au commencement la contrainte physique sert à réparer dans l’enfant le défaut de réflexion.
Les punitions que l’on inflige avec des signes de colère portent à faux. Les enfants n’y voient alors que des effets de la passion d’un autre, et ne se considèrent eux-mêmes que comme les victimes de cette passion. En général il faut faire en sorte qu’ils puissent voir que les punitions qu’on leur inflige ont pour but final leur amélioration. Il est absurde d’exiger des enfants que l’on punit qu’ils vous remercient, qu’ils vous baisent les mains, etc. ; c’est vouloir en faire des êtres serviles. Lorsque les punitions physiques sont souvent répétées, elles font des caractères intraitables ; et, lorsque les parents punissent leurs enfants pour leur égoïsme, ils ne font que les rendre plus égoïstes encore. — Ce ne sont pas toujours non plus les plus mauvais hommes qui sont intraitables, mais souvent ils se rendent aisément aux bonnes représentations.
L’obéissance de l’adolescent est distincte de celle de l’enfant. Elle consiste dans la soumission aux règles du devoir. Faire quelque chose par devoir, c’est obéir à la raison. C’est peine perdue que de parler de devoir aux enfants. Ils ne le voient en définitive que comme une chose dont la transgression est suivie de la férule. L’enfant pourrait être guidé par ses seuls instincts ; mais, lorsqu’il grandit, il a besoin de l’idée du devoir. Aussi ne doit-on pas chercher à mettre en jeu chez les enfants le sentiment de la honte, mais attendre pour cela le temps de la jeunesse. Il ne peut en effet trouver place en eux que quand l’idée de l’honneur a déjà pris racine.
Un second trait auquel il faut surtout s’attacher dans la formation du caractère de l’enfant, c’est la véracité. C’est en effet le trait principal et l’attribut essentiel du caractère. Un homme qui ment est sans caractère, et s’il y a en lui quelque chose de bon, c’est qu’il le tient de son tempérament. Bien des enfants ont un penchant pour le mensonge, qui n’a souvent d’autre cause qu’une certaine vivacité d’imagination. C’est aux pères à prendre garde qu’ils ne s’en fassent une habitude, car les mères regardent ordinairement cela comme une chose