Page:Kant - Doctrine de la vertu.djvu/339

Cette page a été validée par deux contributeurs.
215
DE L’ÉDUCATION PHYSIQUE.

régulière semble moins convenir aux enfants proprement dits.

L’exercice qui consiste à jeter loin et à toucher un but a aussi pour effet d’exercer les sens, particulièrement la vue. Le jeu de balle est un des meilleurs jeux pour les enfants, parce qu’il s’y joint une course salutaire. En général les meilleurs jeux sont ceux qui, outre l’habileté qu’ils développent, sont encore des exercices pour les sens, par exemple ceux qui exercent la vue à juger exactement de la distance, de la grandeur et de la proportion, à trouver la position des lieux d’après les contrées, en quoi le soleil doit nous aider, etc. Ce sont là de bons exercices. De même l’imagination locale, je veux dire l’habileté à tout se représenter dans les lieux que l’on a réellement vus, est quelque chose de très-avantageux ; elle donne par exemple la satisfaction de se retrouver dans une forêt, par l’observation des arbres auprès desquels on a précédemment passé. Il en est de même de la mémoire locale (memoria localis), à l’aide de laquelle on ne sait pas seulement dans quel livre on a lu quelque chose, mais dans quel endroit de ce livre. Ainsi le musicien a le toucher dans la tête, afin de n’avoir plus besoin de le chercher. Il est aussi très-utile de cultiver l’oreille des enfants, et de leur apprendre ainsi à discerner si une chose est proche ou éloignée et de quel côté elle est.

Le jeu de colin-maillard des enfants était déjà connu chez les Grecs ; c’est ce qu’ils appelaient μυίνδα παίσειν. En général les jeux d’enfants sont très-universels. Ceux qui sont usités en Allemagne le sont aussi en Angleterre, en France, etc. Ils ont leur principe dans un certain penchant naturel des enfants, celui de colin-maillard, par exemple, dans le désir de savoir comment ils pourraient s’aider, s’ils étaient privés d’un de leurs sens. La toupie est un jeu particulier ; cependant ces sortes de jeux enfantins fournissent aux hommes la matière de réflexions ultérieures et sont quelquefois l’occasion de découvertes importantes. Ainsi Segner a écrit une dissertation sur la toupie, et la toupie a fourni à un capitaine de vaisseau anglais l’occasion d’inventer un miroir au moyen duquel on peut mesurer sur un vaisseau la hauteur des étoiles.

Les enfants aiment les instruments bruyants, par exemple les petites trompettes, les petits tambours, etc. Mais ces instru-