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ASCÉTIQUE.



DEUXIÈME SECTION.


ascétique.


§ 53.


Les règles de la pratique de la vertu (exercitiorum virtutis) se rapportent à ces deux dispositions de l’âme : le courage et la sérénité (animus strenuus et hilaris) dans l’accomplissement de ses devoirs. Car la vertu a des obstacles à combattre, qu’elle ne peut vaincre qu’en rassemblant ses forces, et en même temps il lui faut sacrifier bien des joies de la vie, dont la perte peut bien parfois rendre l’âme morose et sombre. Or ce que l’on ne fait pas avec plaisir, mais seulement comme une corvée[1], n’a aucune valeur intérieure pour celui qui remplit son devoir dans cet esprit, et ne saurait être aimé : loin de là il évite autant que possible l’occasion de pratiquer ce devoir.

La culture de la vertu, c’est-à-dire l’ascétique morale a pour principe, en tant qu’il s’agit d’un exercice ferme et courageux de la vertu, cette sentence des stoïciens : accoutume-toi à supporter les maux accidentels de la vie, et à t’abstenir des jouissances superflues (sustine et abstine). C’est une espèce de diététique qui consiste à se conserver sain moralement. Mais la santé n’est qu’un bien-être négatif ; elle ne peut être sentie elle-même. Il faut que quelque chose s’y ajoute, qui procure le sentiment de la jouissance de la vie, et qui pourtant soit purement moral. Or c’est le cœur tou-

  1. Als Frohndienst.