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DOCTRINE DE LA VERTU


cette dégradation, sont plus douloureuses pour le patient (qui prétend encore au respect des autres, comme chacun doit le faire) que la perte de ses biens ou de sa vie, mais encore font rougir le spectateur d’appartenir à une espèce qu’on puisse traiter de la sorte.


remarque.


Là est le fondement du devoir de respecter les hommes même dans l’usage logique de leur raison. Ainsi on ne flétrira pas leurs erreurs sous le nom d’absurdités, de jugements ineptes, etc., mais on supposera plutôt qu’il doit y avoir dans leurs opinions quelque chose de vrai, et on l’y cherchera ; en même temps aussi on s’appliquera à découvrir l’apparence qui les trompe (le principe subjectif des raisons déterminantes de leurs jugements, qu’ils prennent par mégarde pour quelque chose d’objectif), et, en expliquant ainsi la possibilité de leurs erreurs, on saura garder encore un certain respect pour leur intelligence. Si au contraire on refuse toute intelligence à son adversaire, en traitant ses jugements d’absurdes ou d’ineptes, comment veut-on lui faire comprendre qu’il s’est trompé ? — Il en est de même des reproches à l’endroit du vice : il ne faut pas les pousser jusqu’à mépriser absolument l’homme vicieux et à lui refuser toute valeur morale ; car, dans cette hypothèse, il ne saurait donc plus jamais devenir meilleur, ce qui ne s’accorde point avec l’idée de l’homme, lequel, à ce titre (comme être moral), ne peut jamais perdre toutes ses dispositions pour le bien.


§ 40.


Le respect de la loi, lequel considéré subjectivement s’appelle sentiment moral, se confond avec la conscience du devoir. C’est pour cela que le témoignage du respect que l’homme se doit, en tant qu’être moral