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DOCTRINE DE LA VERTU


modération, ou le défaut de modestie est, dans la prétention d’être aimé des autres, l’amour-propre[1] (philautio), et dans celle d’en être estimé, la présomption[2] (arrogantia). Le respect que je porte à autrui ou qu’il peut exiger de moi (observantia aliis præstanda) consiste à reconnaître la dignité des autres hommes, c’est-à-dire une valeur qui n’a pas de prix, pas d’équivalent contre lequel on puisse échanger l’objet de l’estimation (æstimii). — Le mépris au contraire consiste à regarder une chose comme n’ayant pas de valeur.


§ 38.


Tout homme a le droit de prétendre au respect de ses semblables, et réciproquement il est obligé lui-même au respect à l’égard de chacun d’eux.

L’humanité est par elle-même une dignité : l’homme ne peut être traité par l’homme (soit par un autre, soit par lui-même) comme un simple moyen, mais il doit toujours être traité comme étant aussi une fin ; c’est précisément en cela que consiste sa dignité (la personnalité), et c’est par là qu’il s’élève au-dessus de tous les autres êtres du monde qui ne sont pas des hommes et peuvent lui servir d’instruments, c’est-à-dire au-dessus de toutes les choses. Tout de même donc qu’il ne peut s’aliéner lui-même pour aucun prix (ce qui serait contraire au devoir du respect de soi-même), de même il ne peut agir contrairement au respect que les autres se doivent aussi nécessairement comme

  1. Eigenliebe.
  2. Eigendünkel.