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INTRODUCTION.


la vertu d’exciter ce sentiment, alors l’humanité se résoudrait (comme par des lois chimiques) en pure animalité, et se confondrait sans retour avec la masse des autres êtres physiques. — Mais, quoique l’on se serve souvent de cette expression, nous n’avons pas plus pour le bien et le mal (moral) de sens particulier, que nous n’en avons pour la vérité ; nous avons la capacité d’être mus dans notre libre arbitre par la raison pure pratique[1], ou par la loi qu’elle prescrit, et c’est cela que nous appelons le sentiment moral.


b.


De la conscience.


De même la conscience[2] n’est pas quelque chose que l’on puisse acquérir, et il n’y a pas devoir qui prescrive de se la procurer ; mais tout homme, comme être moral, la porte originairement en lui. Dire qu’on est obligé d’avoir de la conscience reviendrait à dire qu’on a le devoir de reconnaître des devoirs. En effet la conscience est la raison pratique représentant à l’homme son devoir, dans tous les cas où s’applique la loi morale, afin de l’absoudre ou de le condamner. Elle n’a donc point de relation à un objet, mais seulement au sujet (en qui elle excite le sentiment moral par son action) ; par conséquent elle est un fait inévitable, non une obligation et un devoir. Quand donc on dit que tel homme n’a pas de conscience, on veut dire

  1. Empfänglichkeit der freien Willkühr für die Bewegung derselben durch praktische reine Vernunft.
  2. Das Gewissen.