intérieure[1]. L’impératif moral, par son décret catégorique
(le devoir absolu[2]), indique une contrainte qui ne s’applique pas à tous les êtres raisonnables en général (car il peut y en avoir de saints), mais seulement
aux hommes, c’est-à-dire à des êtres à la fois sensibles et raisonnables, qui ne sont pas assez saints pour n’avoir pas l’envie de violer la loi morale, tout en reconnaissant son autorité, et, alors même qu’ils lui obéissent, pour la suivre volontiers (sans rencontrer de résistance dans leurs penchants), d’où vient justement qu’une contrainte est ici nécessaire[Note de l’auteur 1]. — Mais, comme l’homme est un être libre (moral), si l’on considère
la détermination intérieure de la volonté (le mobile), le concept du devoir ne peut impliquer d’autre contrainte que celle qu’on exerce sur soi-même[3] (par l’idée seule de la loi). C’est ainsi seulement qu’il est possible de concilier cette contrainte (fût-elle même
- ↑ Toutefois l’homme, en se considérant objectivement au point de vue de la destination que détermine en lui la raison pure pratique (en considérant l’humanité dans sa propre personne), se trouve assez saint, comme être moral, pour ne transgresser qu’à regret la loi intérieure. Il n’y a pas, en effet, d’homme si dégradé qui, en la violant, ne sente en soi une résistance, et n’éprouve pour lui-même un sentiment de mépris qui le force à se faire violence. Or il est impossible d’expliquer comment, dans cette alternative où l’homme se trouve (que représente si bien la fable d’Hercule placé entre la vertu et la volupté), il se montre plus disposé à écouter son inclination que la loi ; car nous ne pouvons expliquer ce qui arrive qu’en le dérivant d’une cause, suivant des lois naturelles, et à ce point de vue, nous ne saurions regarder la volonté comme libre. — C’est pourtant cette contrainte intérieure, cette lutte, et l’impossibilité où nous sommes de l’éviter, qui nous font connaître l’incompréhensible attribut de la liberté.