ne donne point dans les écoles pour fondement à l’enseignement moral un catéchisme du droit. « S’il y avait un livre de ce genre, dit-il 1[1], on y pourrait consacrer fort utilement une heure chaque jour, afin d’apprendre aux enfants à connaître et k prendre à cœur le droit des hommes, cette prunelle de Dieu sur la terre. »
Une question délicate se présente ici : celle de savoir quel rôle doivent jouer les idées religieuses dans l’éducation de la jeunesse. Mais d’abord est-il possible de les inculquer de bonne heure aux enfants ? « C’est un point, dit Kant 2[2], sur lequel on a beaucoup disputé. » On sait quelle est à ce sujet l’opinion de Rousseau. Il pense que les enfants ne peuvent se faire de Dieu que des idées grossières et fausses, et qu’il vaut mieux n’en point avoir du tout que d’en avoir de pareilles ; chez eux la religion ne saurait être que superstition, et la superstition, une fois enracinée dans leur esprit, est un obstacle fâcheux aux lumières de la raison. Il en conclut qu’il ne faut point leur parler de cet objet trop sublime et trop grand pour eux, avant qu’ils soient arrivés à un âge où ils soient capables de l’entendre. Kant serait de l’avis de Rousseau, s’il était possible que les enfants ne fussent jamais témoins d’aucun acte de vénération envers Dieu et n’en entendissent même jamais prononcer le nom. Alors, dit-il 3[3], il serait conforme à l’ordre des choses d’attirer d’abord leur attention sur les causes finales, de les instruire peu à peu des harmonies de la nature et du système du monde, et de préparer ainsi leur esprit à concevoir la notion de Dieu. « Mais, ajoute-t-il, comme cela n’est pas possible dans l’état actuel de la société, comme on ne peut faire qu’ils n’entendent pas prononcer le nom de Dieu et qu’ils ne soient pas témoins des démonstrations de la dévotion à son égard, si l’on voulait attendre pour leur apprendre quelque chose de Dieu, il en résulterait pour eux ou une grande indifférence, ou des idées fausses, comme par exemple une crainte superstitieuse de la puissance divine. » Or il estime que rien n’est plus funeste à la vraie moralité : aussi demande-t-il à plusieurs reprises 4[4] qu’on accoutume les enfants à faire le bien pour lui-même et