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qui y donne lieu, l’embarras de ne pas être encore façonné aux conventions humaines. — Art et naïveté sont donc des choses contradictoires, mais il est possible aux beaux-arts, quoique cela leur arrive rarement, de représenter la naïveté dans une personne imaginaire. Il ne faut pas confondre avec la naïveté une simplicité franche qui ne gâte point la nature par l’artifice, uniquement parce qu’elle ignore ce que c’est que l’art de vivre en société.

On peut rapporter aussi le comique [1] aux choses qui, en nous égayant, tiennent au plaisir du rire et qui appartiennent à l’originalité de l’esprit, mais non pas au talent des beaux-arts. Le comique[2] dans le bon sens, signifie en effet le talent de se mettre volontairement dans une certaine disposition d’esprit où on juge toutes choses tout autrement qu’à l’ordinaire (même en sens inverse), et cependant d’après certains principes de la raison. Celui qui est involontairement soumis à cette disposition d’esprit, s’appelle fantasque[3] ; mais celui-ci qui la prend volontairement et avec intention (pour exciter le rire par un contraste frappant) s’appelle comique[4]. Mais le comique appartient plutôt aux arts agréables qu’aux beaux-arts, parce que l’objet

  1. die launige Manier.
  2. Laune.
  3. launisch.
  4. launige.