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ou l’esprit belliqueux (dont elle a fait Mars), qu’au moyen d’une allégorie ou d’attributs qui font un bon effet, et par conséquent d’une manière indirecte, qui appelle la réflexion de la raison et ne s’adresse pas seulement au Jugement esthétique.

Voilà pour la belle représentation d’un objet, laquelle n’est proprement que la forme de l’exhibition d’un concept qui par là se communique universellement. Mais, pour donner cette forme aux productions des beaux-arts, il ne faut que du goût : c’est avec le goût, avec un goût exercé et corrigé par de nombreux exemples puisés dans l’art ou dans la nature, que l’artiste apprécie son œuvre, et qu’après bien des essais, souvent laborieux, il trouve enfin une forme qui le satisfait. Cette forme n’est donc pas comme une chose d’inspiration, ou l’effet du libre essor des facultés de l’esprit, mais le résultat de longs et pénibles efforts par lesquels l’artiste cherchait toujours à la rendre plus conforme à sa pensée, en conservant toujours la liberté du jeu de ses facultés.

Mais le goût n’est qu’une faculté de juger, ce n’est pas un pouvoir créateur, et ce qui lui convient n’est pas pour cette seule raison une œuvre des beaux-arts ; ce peut être une production qui appartienne aux arts utiles et mécaniques ou même à la science, et qui soit l’effet de règles déterminées qu’on peut apprendre et qu’on doit sui-