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tion donnée ; or on demande si un jugement esthétique de cette espèce, outre l’exposition de ce que l’on conçoit en lui, a besoin aussi d’une déduction qui légitime sa prétention à quelque principe (subjectif) a priori.

À quoi je réponds que le sublime de la nature n’est appelé ainsi qu’improprement, et qu’à proprement parler il ne doit être attribué qu’à un état de l’esprit, ou plutôt aux principes qui le produisent dans la nature humaine. L’appréhension d’un objet d’ailleurs informe et discordant n’est que l’occasion qui amène le sentiment de cet état, et par conséquent l’objet est employé pour une fin subjective, mais, par lui-même et par sa forme, il n’a aucune finalité (c’est en quelque sorte species finalis accepta, non data). C’est pourquoi notre exposition des jugements sur le sublime de la nature en était en même temps la déduction. En effet, en analysant la réflexion de la faculté de juger dans cette sorte de jugements, nous y avons trouvé une relation des facultés de connaître à une finalité qui doit servir a priori de principe à la faculté d’agir suivant des fins (à la volonté), et par conséquent une relation qui elle-même contient une finalité a priori. Or cela nous a fourni immédiatement la déduction de cette espèce de jugements, en justifiant leur prétention à une valeur universellement nécessaire.