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ANALYTIQUE DU SUBLIME.

privation, mais au profit de la liberté intérieure, et ce qui nous découvre en même temps en nous l’immense profondeur de cette faculté suprasensible avec ses conséquences qui s’étendent à l’infini), la satisfaction, au point de vue esthétique (relativement à la sensibilité) est négative, c’est-à-dire contraire à l’intérêt des sens, et, au point de vue intellectuel, positive et liée à un intérêt. Il suit de là qu’à juger esthétiquement, on doit moins se représenter le bien intellectuel, qui contient une finalité absolue (le bien moral), comme beau que comme sublime, et qu’il excite plutôt le sentiment du respect (qui méprise l’attrait) que celui de l’amour et d’une douce inclination : car la nature humaine ne s’attache pas à ce bien par elle-même, mais par la violence que la raison fait à la sensibilité. Réciproquement, ce que nous appelons sublime dans la nature, soit au dehors, soit en nous-mêmes (par exemple certaines affections), nous ne nous le représentons que comme une puissance qu’a l’esprit de s’élever, par des principes humains, au-dessus de certains obstacles de la sensibilité, et c’est par là qu’il est intéressant. Arrêtons-nous un peu sur ce dernier point. L’idée du bien jointe à l’affection s’appelle enthousiasme. Cet état de l’esprit paraît tellement sublime, qu’on dit ordinairement que sans lui rien de grand ne