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ANALYTIQUE DU SUBLIME.


facultés de connaître sur le plus grand pouvoir de la sensibilité.

Le sentiment du sublime est donc à la fois un sentiment de peine qui naît de la disconvenance de l’imagination, dans l’estimation esthétique de la grandeur, avec l’estimation rationnelle, et un sentiment de plaisir produit par l’accord de ce même jugement, que nous portons sur l’impuissance des plus grands efforts de la sensibilité, avec des idées de la raison, en tant que c’est pour nous une loi de ne pas laisser de tendre à ces idées. C’est en effet pour nous une loi (de la raison), et il est dans notre destination de regarder comme petit, en comparaison des idées de la raison, tout ce que la nature, en tant qu’objet des sens, contient de grand pour nous ; et ce qui excite en nous le sentiment de cette destination supra-sensible s’accorde avec cette loi. Or l’effort extrême que fait l’imagination pour arriver à l’exhibition de l’unité dans l’estimation de la grandeur indique une relation à quelque chose d’absolument grand, par conséquent aussi une relation à cette loi de la raison qui ne permet pas une autre mesure suprême des grandeurs. Ainsi, la perception intérieure de la disconvenance de toute mesure sensible avec l’estimation rationnelle de la grandeur suppose une conformité aux lois de la raison ; elle •contient une peine excitée en nous par le sentiment de notre destination supra-sensible, d’après


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