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MÉTHODOLOGIE TRANSCENDENTALE


ment à quelle cause attribuer ce désir indomptable de poser quelque part un pied ferme au delà des limites de l’expérience ? Elle soupçonne des objets qui ont pour elle un grand intérêt. Elle entre dans le chemin de la pure spéculation pour s’en rapprocher ; mais ils fuient devant elle. Il est à présumer qu’il y a lieu d’espérer pour elle un plus heureux succès sur la seule route qui lui reste encore, celle de l’usage pratique.

J’entends par canon l’ensemble des principes à priori du légitime usage de certaines facultés de connaître en général. Ainsi la logique générale dans sa partie analytique est un canon pour l’entendement et la raison en général, mais seulement dans sa forme, car elle fait abstraction de tout contenu. Ainsi l’analytique transcendentale était le canon de l’entendement pur ; car il est seul capable de véritables connaissances synthétiques à priori. Mais là où il ne peut y avoir d’usage légitime d’une faculté de connaître, il n’y a point de canon. Or, suivant toutes les preuves qui ont été données jusqu’ici, toute connaissance synthétique de la raison pure dans son usage spéculatif est absolument impossible. Il n’y a donc pas de canon de l’usage spéculatif de la raison (car cet usage est entièrement dialectique), mais toute logique transcendentale n’est à cet égard que discipline. Par conséquent, s’il y a quelque part un usage légitime de la raison pure, auquel cas il doit y avoir aussi un canon de la raison pure, ce canon ne concerne pas l’usage spéculatif, mais l’usage pratique de cette faculté. C’est cet usage que nous allons maintenant rechercher.


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