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principe qui veut que tout ce qui arrive ait une cause n’est point du tout connu et prescrit par la raison. Il rend possible l’unité de l’expérience, et il n’emprunte rien à la raison, qui, sans ce rapport à une expérience possible, n’aurait pu avec de simples concepts prescrire une unité synthétique de ce genre.

En second lieu, la raison dans son usage logique cherche la condition générale de son jugement (de la conclusion), et le raisonnement n’est lui-même autre chose qu’un jugement que nous formons en subsumant sa condition sous une règle générale (la majeure). Or, comme cette règle doit être soumise à son tour à la même tentative de la part de la raison, et qu’il faut aussi chercher (au moyen d’un prosyllogisme) la condition de la condition, et ainsi de suite aussi loin qu’il est possible de remonter, on voit que le principe propre de la raison en général dans son usage logique est de trouver pour la connaissance conditionnelle de l’entendement l’élément inconditionnel qui doit en accomplir l’unité.

Mais cette maxime logique ne peut être un principe de la raison pure, qu’autant qu’on admet qu’avec le conditionnel est donnée aussi (c’est-à-dire contenue dans l’objet et dans sa liaison) toute la série des conditions subordonnées, laquelle, par conséquent, est elle-même inconditionnelle.

Or un tel principe de la raison pure est évidemment synthétique ; car le conditionnel se rapporte bien analytiquement à une condition, mais non pas à l’inconditionnel. Il en doit dériver aussi diverses propositions synthétiques, dont l’entendement pur ne sait rien, puisqu’il n’a affaire qu’à des objets d’expérience possible, dont la connaissance et la synthèse sont toujours conditionnelles.