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quoi il a été nécessaire d’en donner aussi plus haut une déduction transcendentale. Le lecteur doit donc être convaincu de l’indispensable nécessité de chercher une déduction transcendentale de ce genre avant de faire un seul pas dans le champ de la raison pure ; car autrement il marcherait en aveugle, et, après avoir erré çà et là, il finirait par en revenir à l’ignorance d’où il serait parti. Mais il faut aussi qu’il se rende bien compte d’avance des inévitables difficultés qu’il doit rencontrer, afin qu’il ne se plaigne pas d’une obscurité qui enveloppe profondément la chose même, et qui ne se laisse pas trop tôt décourager par les obstacles à vaincre ; car il s’agit de repousser absolument toute prétention à des vues de la raison pure sur le champ le plus attrayant, sur celui qui est placé en dehors des limites de toute expérience, et de porter cette recherche critique à son plus haut degré de perfection.

Il ne nous a pas été difficile de faire comprendre comment, bien que les concepts de l’espace soient des connaissances à priori, ils ne s’en rapportent pas moins nécessairement à des objets, et rendent possible une connaissance synthétique de ces objets, indépendamment de toute expérience. En effet, comme c’est uniquement au moyen de ces formes pures de la sensibilité qu’une chose peut nous apparaître, c’est-à-dire devenir un objet d’intuition empirique, l’espace et le temps sont de pures intuitions qui contiennent à priori la condition de la possibilité des objets comme phénomènes, et la synthèse qui s’y opère a une valeur objective.

Les catégories de l’entendement, au contraire, ne nous représentent pas les conditions sous lesquelles des objets sont donnés dans l’intuition et sous lesquelles conséquem-