Page:Kant - Critique de la raison pure, I-Intro.djvu/76

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
lxv
DE LA RAISON PURE


les différents temps où elle existe ; 4° elle est en relation avec des objets possibles dans l’espace. Le premier de ces prédicats transcendentaux dorme le concept de son immatérialité ; le second, celui de son incorruptibilité ; le troisième, celui de sa personnalité ; et ces trois concepts réunis forment celui de sa spiritualité, par-suite de son immortalité. Quant au quatrième attribut, il nous représente la substance pensante comme le principe de la vie dans la matière, ou ce qu’on appelle l’âme dans le sens du mot grec ψυχη ou du mot latin anima, ce que nous nommons le principe vital.

Mais, suivant Kant, les raisonnements qui conduisent à ces trois propositions ne sont que des paralogismes : nous ne faisons ici que tourner dans un cercle en nous servant, pour porter certains jugements sur le moi, d’une idée qui elle-même est vide de tout contenu ; et c’est faussement que nous prenons cette psychologie transcendentale pour une science rationnelle nous faisant connaître la nature de notre être pensant.

Voyons comment Kant explique ce résultat de sa critique. Dans la première édition, il l’avait très-longuement justifié en présentant sous une forme syllogistique chacun des paralogismes d’où résultent les quatre propositions indiquées plus haut, et en les soumettant successivement à un examen fort détaillé. La seconde édition simplifie beaucoup ce travail, sans en rien retrancher d’essentiel. C’est ici que se plaçait cette réfutation de l’idéalisme que Kant a reportée plus haut. Nous suivrons la nouvelle rédaction, et nous nous y bornerons, parce qu’il serait beaucoup trop long d’y joindre encore l’analyse de la première. J’engage cependant ceux qui veulent étudier à fond la Critique de la raison pure à ne pas négliger cette première rédaction : ils y trouveront une foule d’observations pénétrantes qui ne sont point à dédaigner, mais que je ne puis noter ici.

Une remarque générale domine toute cette partie de la critique kantienne. Pour connaître un objet, la pensée en général ne suffit pas ; il faut une intuition déterminée à laquelle elle s’applique. Cela est également vrai du moi : je ne me connais pas moi-même par cela seul que je puis dire : je pense, car ce n’est là qu’une condition générale accompagnant tous mes concepts ; il faut que j’aie aussi conscience d’une intuition intérieure comme d’un acte déterminé relativement à la fonction de


I. K