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ANALYSE DE LA CRITIQUE


Il en résulte, il faut bien le dire, une certaine fatigue pour le lecteur qui s’impatiente de tant de lenteur et voudrait marcher plus vite ; mais, quand on a affaire à un philosophe tel que Kant, ces retours mêmes sont accompagnés de développements si riches et d’idées si lumineuses qu’on ne saurait les négliger. Mais de là aussi une nouvelle difficulté pour l’analyse, déjà si difficile, d’un ouvrage comme celui de la Critique de la raison pure.

Un premier point dont la solution est contenue dans les résultats précédemment exposés, mais que l’auteur veut faire ressortir ici pour compléter son œuvre critique, c’est ce qu’il nomme la déduction transcendentale des idées de la raison pure (p. 235). Si ces idées ne sont pas de vaines fictions, mais qu’elles aient quelque valeur réelle, il doit y en avoir une déduction possible, c’est-à-dire qu’on doit pouvoir déduire cette valeur de leur nature même. Cette déduction pourra bien différer de celle des catégories de l’entendement, mais elle doit être aussi sûre et aussi solide. Elle consiste à montrer, comme on l’a fait précédemment, que toutes les idées de la raison pure sont elles-mêmes des principes dont la nature ou la fonction est de servir de règles à l’expérience en ordonnant les objets suivant une unité systématique nécessaire à sa perfection. L’erreur est de les prendre pour des principes constitutifs servant à étendre notre connaissance à plus d’objets que l’expérience n’en peut donner : elles ne nous font connaître aucun objet réel en dehors de l’expérience, et sous ce rapport nous ne saurions justifier leur valeur objective ; mais, considérées comme principes régulateurs de l’expérience, elles ont une valeur incontestable. Or là est précisément la solution du problème posé par Kant, ou de la question de leur déduction transcendentale. C’est pourquoi notre philosophe Insiste sur ce point.

Soit, par exemple, l’idée psychologique. Cette idée nous permet de rattacher à une unité qui forme le fil conducteur de l’expérience interne tous les phénomènes, tous les actes de notre esprit, comme si cet esprit était une substance simple et identique à elle-même au milieu du changement continuel de ses états. De même l’idée cosmologique nous enjoint de poursuivre, sans jamais nous arrêter, la recherche des conditions des phénomènes naturels, comme si la série en était sans terme. De même enfin, l’idée théologique, en nous faisant envisager les choses du monde