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PRÉFACE

Il serait sans doute plus agréable pour notre raison spéculative de pouvoir, par elle-même et sans ce détour, résoudre ces problèmes et de tenir prête cette solution, comme une lumière à suivre (Einsicht) pour l’usage pratique ; mais notre faculté de spéculation n’a pas été aussi bien traitée. Ceux qui se vantent d’avoir ces connaissances si hautes ne devraient pas les cacher, mais les offrir publiquement à l’examen et à la vénération (Hochschätzung). Ils veulent prouver ; eh bien ! qu’ils prouvent donc, et la critique déposera toutes ses armes aux pieds des vainqueurs. Quid statis ? Nolint. Atqui licet esse beatis. — Donc, puisqu’en fait, ils ne le veulent pas, probablement parce qu’ils ne le peuvent, il faut encore une fois reprendre nos armes, chercher dans l’usage moral de la raison, et fonder sur cet usage les concepts de Dieu, de liberté, d’immortalité, à la possibilité desquels la spéculation ne trouve pas de garanties suffisantes.

Ici s’explique tout d’abord aussi (auch allererst) l’énigme de la critique, à savoir comment on peut, dans la spéculation, dénier (absprechen) la réalité objective à l’usage supra-sensible des catégories et cependant la leur reconnaître, relativement aux objets de la raison pure pratique, car cela doit paraître nécessairement inconséquent, aussi longtemps qu’on ne connaît cet usage pratique que de nom. Mais si maintenant, par une analyse complète de la raison pratique, on apprend que la réalité dont il est ici question {gedachte Realität hier) n’implique aucune