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DE L'INTELLIGENCE.


peut donc pas définir la vertu : l’habileté dans les actions libres conformes à la justice ; car alors elle serait purement un mécanisme dans l’usage de la faculté. La vertu est au contraire la force morale dans l’accomplissement du devoir, force qui ne doit jamais devenir habitude, mais qui doit toujours au contraire procéder à nouveau et originellement de la façon de penser.

Le facile est opposé au difficile, mais souvent aussi à l’onéreux. Est facile pour un sujet, ce dont la réalisation exige une dépense de forces inférieures à celles dont il se sent doué. Qu’y a-t-il de plus facile que les formalités des visites, des félicitations et des condoléances ? Mais qu’y a-t-il aussi de plus fatiguant pour un homme occupé ? Ce sont des vexations amicales (contrariétés) dont chacun désire de tout son cœur être affranchi, tout en évitant de changer l’usage.

Il n’y a pas de vexations de ce genre à se conformer à des usages extérieurs religieux, mais qui ne se rapportent proprement qu’à une forme ecclésiastique. Ce qu’il y a de méritoire dans ces usages dévots consiste précisément en ce qu’ils ne servent à rien, et dans la simple soumission des croyants à se laisser patiemment tourmenter par des cérémonies et des observances, par des expiations et des macérations ( le plus est le mieux). Ces suggestions, mécaniquement faciles à la vérité (puisqu’elles n’exigent le sacrifice d’aucune inclination vicieuse), doivent être moralement très difficiles et onéreuses à l’homme raisonnable. — Quand donc le grand Maître populaire de morale disait : « Mes