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dans un esprit calme et accessible à toutes les raisons, que mon jugement antérieur puisse en être confirmé ou infirmé, que j’en puisse être déterminé, ou que j’en sois réduit à douter. Partout où je trouve quelque chose qui m’instruit, je le prends. Le jugement de quiconque contredit mes raisons est mon jugement aussitôt qu’après l’avoir opposé au bassin de l’égoïsme, et ensuite dans la même balance, à mes principes présumés, et que j’y ai trouvé une plus grande valeur. Autrefois je n’envisageais l’entendement humain qu’au point de vue du mien ; à présent je me mets à la place d’une raison étrangère et extérieure, et j’observe mes jugements avec leurs occasions les plus secrètes du point de vue des autres. La comparaison des deux observations me donne, à la vérité, deux fortes parallaxes, mais elle est aussi l’unique moyen de prévenir une illusion d’optique, et de mettre les notions à leur vraie place, où elles sont réellement par rapport à la faculté de connaître de la nature humaine. On dira que c’est là un langage bien sérieux pour une question aussi indifférente que celle que nous traitons, qui mérite d’être appelée plutôt un amusement qu’une occupation sérieuse, et l’on n’aura pas tort de juger ainsi. Mais quoique on ne doive pas mettre de grands préparatifs à une bagatelle, on peut cependant le faire en pareille occasion, et la précaution superflue, quand il s’agit de prononcer dans de petites choses, peut servir d’exemple dans les cas importants. Je ne trouve pas qu’un intérêt quelconque, ou une inclination conçue avant examen, ait rien ôté à mon esprit de sa souplesse pour toutes sortes de principes pour ou contre, excepté en un seul cas. La balance de l’entendement n’est cependant pas tout à fait en équilibre, et l’un des bras, celui qui porte pour inscription : Espérance dans l’avenir, a un avantage mécanique qui fait que des raisons légères qui tombent dans son plateau l’emportent sur les spéculations contraires d’un poids cependant supérieur en soi. Telle est l’unique injustice que je ne puis pas bien prévenir, et qu’en fait je ne veux même prévenir jamais. J’avoue donc que tous les contes de revenants