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tion contrainte de l’éducation recherchée, et, pour être bref (si l’on omet ce que des hommes, qui lui apprennent à rechercher et à priser l’or, ont déjà gâté dans sa personne), qui semble être un enfant parfait, dans le sens où peut le désirer un moraliste expérimentateur qui voudrait bien ne pas débiter les belles chimères de M. Rousseau avant de les avoir examinées. Du moins cette admiration, dont tous les spectateurs ne sont pas capables, ne serait pas aussi ridicule que celle où cet enfant célèbre de la Silésie, à la dent d’or, a placé un grand nombre de savants allemands, qui se sont longtemps fatigués à expliquer cette merveille avant de laisser ce soin à un orfèvre. »

Il serait à désirer que Kant eût étendu ses remarques sur ce sujet, et que des observations faites sur cet enfant, comme on en voit peu, eussent été mises sous ses yeux. Mais on fit reconduire à la frontière l’aventurier, qui avait été la première occasion de l’écrit : Des maladies mentales, avec le jeune sauvage. On n’en a pas entendu reparler depuis.

La simplicité et la modération de la nature n’exigent et ne forment dans l’homme que des notions communes et une honnêteté vulgaire ; la contrainte artificielle et le luxe de l’état social produisent des parleurs élégants et des raisonneurs, mais aussi, par occasion, des fous et des fripons. Ils donnent naissance à la sage et modeste apparence avec laquelle on peut également se passer d’entendement et de probité, pourvu que le voile jeté par la décence sur les vices secrets de la tête ou du cœur soit d’un tissu assez épais. Suivant le degré d’élévation de l’art, raison et vertu sont enfin le mot d’ordre général, mais de telle sorte que l’affectation de parler de l’une et de l’autre peut dispenser des personnes bien élevées et polies de se charger de ce bagage. La considération générale qui s’attache à ces deux mérites fait néanmoins cette remarquable différence, que chacun est beaucoup plus jaloux des avantages de l’esprit que des qualités estimables de la volonté, et que dans la comparaison entre la bêtise et la friponnerie, personne n’hésiterait un