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où il se disait avoir fait partie d’une société imposante. Pour ne pas rejeter aveuglément le préjugé des apparitions et des visions par un autre préjugé, je crus donc raisonnable de me renseigner encore avec plus de précision sur cette histoire. J’écrivis à mon officier à Copenhague, en lui donnant toutes sortes d’instructions. Il me répondit qu’il avait encore entretenu de cette affaire le baron de Dietrichstein, que le fait était bien réel, que le professeur Schlegel l’avait assuré qu’il n’était pas possible d’en douter. Il me conseilla, comme il partait alors pour l’armée placée sous les ordres du général Saint-Germain, d’écrire à Swedenborg même, pour avoir des détails plus circonstanciés. Je m’adressai, en effet, à cette homme prodigieux, et la lettre lui fut remise en mains propres par un commerçant anglais à Stockholm. On a fait savoir ici que M. Swedenborg avait très bien pris ma lettre, et qu’il avait promis d’y répondre. Mais cette réponse est encore à venir. J’ai fait depuis la connaissance d’un habile homme, d’un Anglais, qui a passé ici l’été dans une sorte d’incognito, et je l’ai prié, au nom de l’amitié qui nous avait unis, de recueillir des renseignements plus précis, à son voyage à Stockholm, sur la faculté prodigieuse de M. de Swedenborg. Ses premiers rapports ne parlaient que de l’histoire que vous connaissez ; il la tenait des personnes les plus considérées à Stockholm. Il n’avait pas encore parlé à M. de Swedenborg, mais il espérait le faire, quoiqu’il trouvât difficile de croire à la réalité de tout ce que les personnes les plus raisonnables de la ville racontaient de son commerce avec le monde invisible des esprits. Mais ses lettres suivantes étaient d’un tout autre ton. Non seulement il a parlé à M. de Swedenborg, mais il lui a rendu visite chez lui, et il est on ne peut plus émerveillé de faits si extraordinaires. Swedenborg est un homme raisonnable, complaisant, et d’une grande simplicité. C’est un savant, et mon ami m’a promis de m’envoyer sous peu quelques-uns de ses écrits. Il lui a dit, sans détour, que Dieu lui a fait la grâce singulière de se mettre à volonté en rapport avec les âmes des trépassés. Il en donne des