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§ LXXXV.

Du penchant de la présomption comme passion.

J’entends par présomption, considérée comme mobile des désirs, l’illusion pratique interne qui consiste à réputer objectif le subjectif dans le mobile. La nature veut de temps en temps des excitations plus fortes de la passion pour ranimer l’activité de l’homme, afin qu’il ne perde pas dans la seule jouissance le sentiment de la vie. Elle a donc montré d’une manière aussi sage que bienfaisante à l’homme naturellement paresseux, des objets qui, grâce au jeu de l’imagination, semblent des fins réelles (l’acquisition possible de l’honneur, du pouvoir, de la fortune), qui lui donnent de l’occupation malgré son penchant à ne rien faire, et le font ainsi travailler beaucoup tout en ne faisant rien. L’intérêt qu’il prend à cette œuvre stérile est donc un intérêt de pure présomption, et la nature joue donc ici avec l’homme, et le pousse ainsi à sa fin à elle, puisque cette fin consiste (objectivement) dans la persuasion qu’il s’est donné à lui-même une fin qui lui est propre. — Ces inclinations de la présomption, précisément parce que la fantaisie fait tout ici, sont destinées à devenir passionnées au plus haut degré, lors surtout qu’elles s’exercent sur un terrain où s’engage une lutte humaine.

Les jeux de l’enfance, ceux de la balle, du cerceau, de la course, de la petite guerre ; — plus tard les jeux de l’homme mûr, aux échecs, aux cartes (où la sim-