Page:Kant - Anthropologie.djvu/170

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tés de sa recherche. — Cette quatrième espèce d’aberration pourrait être appelée systématique.

En effet, dans la dernière sorte de perturbation de l’esprit, il n’y a pas purement désordre et déviation des règles de l’usage de la raison, il y a encore déraison positive, c’est-à-dire une autre règle, un point de vue entièrement différent, où l’âme est pour ainsi dire transportée, et d’où elle aperçoit tous les objets différemment, et se trouve comme dans un lieu éloigné du sensorium commune, lequel est cependant nécessaire à l’unité de la vie (de l’animal). De là le mot aberration. De même qu’un paysage montagneux dessiné à vol d’oiseau donne lieu à un tout autre jugement sur la contrée que s’il est vu de la plaine. À la vérité, l’âme ne se sent ou ne se voit pas dans un autre endroit (car elle ne peut se percevoir elle-même dans l’espace, quant au lieu, sans tomber dans une contradiction, parce qu’autrement elle ne s’apercevrait que comme un objet du sens interne) ; mais on s’explique ainsi, du mieux qu’on peut, l’aberration dont il s’agit. — Mais il est étonnant que les facultés de l’âme bouleversée se coordonnent cependant en un système, et que la nature tende ainsi, jusque dans la déraison, à produire un principe de leur union, afin que la faculté de penser, quoique n’aboutissant pas objectivement à la véritable connaissance, mais n’agissant que dans le sens subjectif au profit de la vie animale, ne reste pas inactive.

La tentative de s’observer soi-même par des moyens physiques dans un état qui approche de l’aberration,