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le suppose la réponse d’une certaine dame à la question d’un académicien : Les chevaux mangent-ils aussi la nuit? — Comment donc un si savant homme peut-il être si bête? — C’est d’ailleurs une preuve de bon jugement que de savoir comment il faut convenablement interroger (pour être instruit soit par la nature, soit par un autre homme).

Est simple celui qui ne peut pas embrasser grand· chose par son entendement, mais il n’est pas pour cela stupide s’il ne saisit pas de travers. La locution : C’est honorable mais stupide [niais] (comme quelques-uns dépeignent injustement les domestiques poméraniens), est une manière de parler fausse et souverainement répréhensible. Elle est fausse, car l’honorabilité (la fidélité au devoir par principes) est de la raison pratique. Elle est très blâmable, parce qu’elle suppose que chacun, pourvu qu’il s’en crût capable, tromperait, et que celui qui ne trompe pas ne s’en abstient que par impuissance. — Les proverbes : « Il n’a pas inventé la poudre ; — Il ne trahira pas son pays ; — Il n’est pas sorcier, » révèlent des principes inhumains : à savoir que l’on peut être en sûreté, non en supposant aux hommes une bonne volonté, mais seulement s’ils sont impuissants. — C’est ainsi, dit Hume, que le Grand-Sultan confie son harem, non à la vertu de ceux qui doivent le garder, mais à leur impuissance (comme eunuques noirs). — Ce n’est pas être stupide que d’être très borné quant au nombre (circonscription) des notions ; la stupidité ne regarde que la qualité ou la nature des notions (les principes).