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PRÉFACE DE L'AUTEUR.

nature fait de l’homme ; dans l’étude pratique on veut savoir au contraire ce que l’homme, comme être libre, fait de lui-même, ou ce qu’il en peut et doit faire. — Celui qui se livre à l’investigation des causes physiques, qui recherche, par exemple, le fondement de la mémoire, peut raisonner d’une manière et d’une autre (d’après Descartes) sur les traces qui restent dans le cerveau, à la suite des impressions reçues ; mais il faut avouer qu’il est simple spectateur dans ce jeu de sa représentation, et qu’il est obligé de laisser faire à la nature, puisqu’il ne connaît ni les nerfs ni les fibres du cerveau, et qu’il n’entend rien à leur direction pour le but qu’il se propose. Tout raisonnement théorique à ce sujet est donc en pure perte. — Mais celui qui met à profit les observations faites sur ce qui favorise ou entrave la mémoire, pour donner plus d’étendue ou de promptitude à cette faculté, et qui met ainsi en pratique sa connaissance de l’homme, celui-là fait de l’anthropologie pratique ; et c’est d’anthropologie pratique que nous allons nous occuper.

Cette espèce d’anthropologie, considérée comme connaissance du monde, et qui doit venir après la connaissance acquise dans les écoles, n’est pas encore, à proprement parler, pratique, si elle a pour objet une connaissance étendue des choses dans le monde, par exemple des animaux, des plantes et des minéraux dans différents pays, sous différents climats ; elle ne mérite ce nom qu’autant qu’elle se borne à la connaissance de l’homme envisagé comme citoyen du