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AVANT-PROPOS.


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Voici un nouveau fragment du travail de traduction littérale et d’interprétation critique que j’ai entrepris sur les œuvre de Kant, et que, grâce au bienveillant appui de l’Académie française, j’ai pu continuer en ce temps même. Ce volume a pour objet le Droit. A voir combien, malgré tant d’efforts et d’épreuves, ce principe sacré est encore mal démêlé ou mal affermi parmi nous, on se sent parfois saisi d’un profond découragement, et l’on est tenté de ne chercher plus dans la philosophie, à l’exemple des anciens stoïciens, qu’un refuge pour sa dignité personnelle. Mais, lorsqu’on relève la tête pour regarder les choses de plus haut, on voit bien qu’après tout l’idée du droit ne laisse pas de faire son chemin dans notre vieux monde, et l’on retrouve sa trace lumineuse là même où elle semblait entièrement perdue. À ce point de vue, les maux mêmes dont nous souffrons depuis soixante ans ne nous apparaissent plus que comme les péripéties naturelles d’une lutte qui a de trop puissants obstacles à vaincre pour n’avoir pas ses orages, ses revers et ses défaillances. Regardons les progrès acquis, et songeons à la grandeur du but ; il y a bien là de quoi ranimer nos courages. La philosophie n’est que d’hier, disait naguère une voix éloquente ; de quel jour date donc la science du droit naturel, et quand notre société a-t-elle commencé à la prendre pour modèle ? L’ouvrage dont je publie ici la traduction et le commentaire est contemporain de cette mémorable époque ; il en respire l’esprit, il en reproduit les principes’, il est la philosophie de ces principes. Outre l’éternel intérêt d’un tel monument, il’a donc son à-propos. Malheureusement, même traduit, même commenté, il n’est guère accessible qu’à un petit nombre ; et c’est surtout au