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stitution est donc en soi, pour ce qui concerne le droit, celle qui sert originairement de base à toutes les espèces de constitution civile. Reste seulement à savoir si elle est la seule qui puisse amener une paix perpétuelle.

Or la constitution républicaine, outre la pureté qui distingue son origine, puisqu’elle dérive de la source pure de l’idée du droit, a encore l’avantage de nous montrer en perspective l’effet que nous souhaitons, c’est-à-dire la paix perpétuelle ; en voici la raison. — Lorsque (comme cela doit nécessairement être dans une constitution républicaine) la question de savoir si la guerre aura lieu ou non ne peut être décidée que par le

    loi, de pouvoir être obligé à son tour par celui-ci de la même manière. (Le principe de la soumission juridique étant déjà compris dans l’idée d’une constitution politique en général, n’a pas besoin de définition). — La valeur de ces droits innés, nécessairement inhérents à l’humanité et imprescriptibles, se trouve confirmée et devient plus éclatante encore, lorsque, concevant des êtres plus élevés, on songe aux rapports juridiques des hommes même avec ces êtres, ou lorsque, suivant les mêmes principes, on se représente l’homme comme citoyen d’un monde suprasensible. — En effet, pour ce qui concerne ma liberté, les lois divines, que je ne puis connaître que par ma raison, ne sont obligatoires pour moi qu’autant que j’ai pu y donner moi-même mon assentiment (car je ne me fais d’abord une idée de la volonté divine qu’au moyen de la loi que ma propre raison impose à ma liberté). Quant au principe de l’égalité, quand je supposerais l’être le plus élevé que je puisse concevoir après Dieu (un grand Éon), il n’y a pas de raison pour que, si je fais mon devoir à mon poste, comme lui au sien, j’aie simplement le devoir d’obéir, tandis qu’il aurait le droit de commander. — Ce qui fait que ce principe de l’égalité n’est pas (comme celui de la liberté) applicable à nos rapports avec Dieu, c’est que cet Être est le seul auquel ne s’applique plus l’idée du devoir.
    Pour ce qui est du droit d’égalité de tous les citoyens, comme sujets, la réponse à la question de savoir si l’on peut tolérer une noblesse héréditaire revient à celle-ci : « Le rang accordé par l’État (à un sujet sur un autre) doit-il passer avant le mérite, ou le mérite avant le rang ? » — Il est évident que, si le rang est attaché à la naissance, il est tout à fait incertain que le mérite (l’aptitude et la fidélité à ses fonctions) l’accompagne ; par conséquent autant vaudrait accorder le commandement à un favori sans aucun mérite. Or c’est ce que la volonté générale du peuple ne décrétera jamais dans un contrat originaire (lequel est pourtant le principe de tous les droits). Car un noble n’est pas pour cela un homme noble. — Quant à la noblesse qui s’attache à la fonction[ndt 1] (comme on pourrait appeler le rang d’une magistrature élevée, que l’on peut acquérir par son mérite), le rang ne tient pas, comme une propriété, à la personne, mais au poste, et l’égalité n’est point violée par là, puisqu’en déposant sa fonction, elle dépose aussi son rang et rentre dans le peuple.—

  1. Amtsadel.