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PREMIER ARTICLE DÉFINITIF D’UN TRAITÉ DE PAIX PERPÉTUELLE.

La constitution civile de chaque État doit être républicaine.

La seule constitution qui dérive de l’idée du contrat originaire, sur laquelle doit être fondée toute législation juridique d’un peuple, est la constitution républicaine ; elle se fonde : 1o sur le principe de la liberté des membres d’une société (comme hommes) ; 2o sur celui de la soumission de tous (comme sujets) à une législation unique et commune ; 3o sur la loi de l’égalité de tous les sujets (comme citoyens)[1]. Cette con-

    vit dans l’état de nature m’enlève cette sûreté, et je me trouve ainsi lésé par cet état même où il vit à côté de moi, sinon en fait (facto), du moins parce que l’absence de toute loi qui distingue cet état est pour moi une menace continuelle (statu injusto). Je puis donc le contraindre ou bien à entrer avec moi dans un état légal commun, ou bien à s’éloigner de mon voisinage. — Voici donc le postulat qui sert de fondement à tous les articles qui vont suivre, tous les hommes, qui peuvent agir les uns sur les autres, doivent appartenir à quelque constitution civile. Mais toute constitution juridique, en ce qui touche les personnes qui y sont soumises : est fondée :
    Ou 1o sur le droit civil des hommes formant un peuple (jus civitatis) ;
    Ou 2o sur le droit des gens, qui règle les relations des États entre eux (jus gentium) ;
    Ou 3o sur le droit cosmopolitique, en tant que l’on considère les hommes et les États, dans leurs relations extérieures et dans leur influence réciproque, comme citoyens d’un État universel de l’humanité (jus cosmopoliticum) — Cette division n’est pas arbitraire, mais elle est nécessaire pour l’idée de la paix perpétuelle. Car, si l’un d’eux restait dans l’état de nature, tout en ayant avec les autres un rapport d’influence physique, alors reparaîtrait nécessairement l’état de guerre, c’est-à-dire justement ce dont il s’agit ici de se délivrer.

  1. On ne peut définir la liberté juridique (par conséquent extérieure), comme on le fait ordinairement, « la faculté de faire tout ce que l’on veut, pourvu qu’on ne fasse de tort à personne. » Car que signifie ici le mot faculté[ndt 1] ? la possibilité d’une action, en tant qu’on ne fait par là de tort à personne. La définition de cette faculté reviendrait donc à ceci · « la liberté est la possibilité des actions par lesquelles on ne fait de tort à personne. On ne fait de tort à personne (quoi que l’on fasse d’ailleurs), quand on ne fait de tort à personne ; » ce qui est une véritable tautologie — Il faut bien plutôt définir la liberté extérieure (juridique), la faculté de n’obéir à d’autres lois extérieures qu’à celles auxquelles j’ai pu donner mon assentiment. — De même l’égalité extérieure (juridique] dans un État est ce rapport des citoyens d’après lequel nul ne peut juridiquement obliger un autre à quelque chose, sans se soumettre en même temps à la
  1. Befugniss.