Page:Kant - Éléments métaphysiques de la doctrine du droit.djvu/317

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le marché que l’on fait avec une personne pour un moment de jouissance (pactum fornicationis). Car, pour ce qui est de ce dernier contrat, tout le monde conviendra que la personne qui l’a conclu ne peut être légitimement mise en demeure de tenir sa promesse, si elle s’en repent ; et ainsi s’évanouit aussi le premier contrat, celui du concubinage (comme pactum turpe), puisque ce serait un contrat de location[1] (locatio, conductio), ayant pour but de faire servir à l’usage d’une personne une partie d’une autre personne, et par conséquent, à cause de l’indissoluble unité de toutes les parties de la personne, la personne entière, qui se livrerait comme une chose à la discrétion d’autrui ; chacune des deux personnes peut donc rompre quand il lui plaît le contrat conclu avec l’autre, sans que celle-ci soit fondée à se plaindre d’être lésée dans son droit — Il en est de même encore des mariages de la main gauche, dont le but est de tourner l’inégalité de condition des deux parties au profit de la domination de l’une sur l’autre ; car dans le fait ces sortes de mariage ne se distinguent pas, au regard du droit naturel, du concubinage, et ne sont pas de véritables mariages. — Ici se présente la question de savoir si c’est une loi contraire à l’égalité des époux, comme tels, que celle qui dit à l’homme, dans son rapport avec la femme : tu seras le maître (tu seras la partie qui commande, et elle celle qui obéit). On ne saurait la considérer comme contraire à l’égalité naturelle d’un couple humain, si cette domination n’a d’autre but que de faire tourner au profit de la communauté la supériorité naturelle des facultés de l’homme sur celles de la femme et le droit au commandement qui se fonde sur cette supériorité ; car elle peut être elle-même rattachée au devoir de l’unité et de l’égalité relativement à la fin.

§ XXVII.

Le contrat de mariage n’est accompli que par la cohabitation conjugale (copula carnalis). Un contrat entre deux personnes de sexe différent, convenant en

  1. Verdingung.