Page:Kant - Éléments métaphysiques de la doctrine du droit.djvu/209

Cette page a été validée par deux contributeurs.
7
PRÉFACE.


y avoir qu’une raison humaine, de même il ne peut pas y avoir plusieurs philosophies ; c’est-à-dire que, si l’on veut procéder en philosophie par principes, il n’y a qu’un seul vrai système possible, si diverses et si contraires qu’aient été souvent les opinions des philosophes sur une seule et même question. C’est ainsi que le moraliste a raison de dire qu’il n’y a qu’une vertu et une doctrine de la vertu, c’est-à-dire un seul système qui ramène à un principe tous les devoirs de vertu ; le chimiste, qu’il n’y a qu’une chimie (celle de Lavoisier) ; le médecin, qu’il n’y a qu’un principe sur lequel on puisse fonder le système de la classification des maladies (celui de Brown), sans prétendre, parce que le nouveau système exclut tous les autres, rabaisser le mérite des prédécesseurs (moralistes, chimistes ou médecins). Sans les découvertes, en effet, ou sans les tentatives même malheureuses de nos devanciers, nous ne serions point arrivés à cette unité qu’exige le vrai principe de la philosophie pour former de toute cette science un système. — Quand donc quelqu’un annonce un système de philosophie comme son propre ouvrage, c’est comme s’il disait : « Avant cette philosophie il n’y en a pas encore eu d’autres. » Car accorder qu’il y en a eu une autre (vraie), ce serait reconnaître qu’il y a eu sur les mêmes objets deux espèces de vraies philosophies, ce qui est contradictoire. — Ainsi, lorsque la philosophie critique se donne pour une phi-