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LA MORALE DE KANT


grand crédit, croil à cette nécessité, bien qu’il n’essaie mémo pas de la démontrer ; il ne peul croire qu’il puisso « revenir au même pour un homme de s’être conduit honnêtement ou malhonnêtement, avec équité ou avec violence, bien qu’il n’ail recueilli avant sa mort aucun bonheur pour ses —vertus et aucun châtiment pour ses fautes*. » Ella raison pratique confirme une fois de plus ce jugement du bon sens, lorsqu’elle conçoit un souverain bien qu’elle se donne pour but final cl qui esl l’harmonie du bonheur avec la moralité*. Sans doute nous n’en serions pas moins étroitement liés par la règle des mœurs si celte harmonie no devait jamais se réaliser, car les lois morales commandent sans con-’ilion, mais il n’y aurait plus alors de but final à poursuivre par l’accomplissement du devoir, ou plutôt il n’y aurait plus qu’une lin incomplète, tandis que, si le bonheur doit se joindre à la vertu, nous pouvons nous proposer comme but l’épanouissement complet do noire personnalité.

Il n’est donc pas juste de reprocher a Kant de nous avoir proposé un devoir sans matière et sans objet. Le devoir a un objet qui est de réaliser un idéal, impossible, il est vrai, icibas, celui d’une volonté parfaitement bonne et parfaitement heureuse, par cela même qu’elle est jiarfaitement bonne. Il sera facile maintenant de comprendre comment le devoir postule l’immortalité et l’existence de Dieu.

La sainteté d’abord ne peut se réaliser dans le monde sensible, parce que dans ce monde la volonté ne peut jamais s’affranchir complètement des inclinations et de l’amour de soi. Comme d’autre part cette sainteté est exigée comme pratiquement nécessaire, il faut la chercher dans un progrès indéfini, grâce auquel la part de l’égoïsme dans nos volitions se réduirait petit à petit à zéro. Mais ce progrès indéfini n’csl possible que dans la supposition d’une existence et d’une ■ personnalité indéfiniment persistantes1..

La démonstration de l’existence de Dieu est fondée sur la

lit I. Ci’itique du jugement : Méthodologie du jugement téléologique ; Parallèle de ta théologie physique et de la théologie morale, lïarni, p. 182.

2. Ihid. Barni, p. 169.

3. Voir Critique de la liaison pratiqtie. Pari. I, Liv. H, eh. II, iv. Barni, p. 323. Picavet, p. 222.