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DEUXIÈME SECTION


ce prétendu sens spécial*, il est moins éloigné do la moralité et de la dignité qui lui appartient (quoiquo ce soit la marque d’un esprit bien superficiel d’en appeler à co sens, car ce sont ceux qui sont incapables do’penser qui espèrent se tirer d’affaire avec l’aido du sentiment même la où il s’agit de lois universelles, et d’autre part les sentiments, qui, par leur nature, diffèrent infiniment les uns des autres, quant au degré, no peuvent fournir une mesure fixe du bon et du mauvais, sans compter que l’homme qui juge par sentiment no peut avoir la prétention d’imposer son jugement a autrui). Mais lo sens moral fait au moins a la vertu l’honneur de lui attribuer immédiatement la satisfaction cl lo respect qu’ello nous inspire, il no lui dit pas en face que ce n’est pas sa beauté mais seulement l’intérêt qui nous attache à elle.

Parmi les principes intelligibles ou rationnels do la moralité, le meilleur est le concept ontologique do la Perfection (il est pourtant bien vide, bien indéterminé et par suite bien peu utilisable pour découvrir, dans lo champ immense de la réalité, la plus grande somme de perfection qui puisse nous convenir, sans compter que, lorsqu’il s’agit de distinguer spécifiquement la réalité, dont il est ici question, de toute autre, il montre une tendance irrésistible à tourner dans un cercle

  • Je rattache le principe du sentiment moral au principe du bonheur, parce que tout intérêt empirique causé par l’agrément qu’une chose nous procure, soit immédiatement, et abstraction faite de toute espérance d’un avantage ultérieur, soit au contraire en vue de cet avantage, promet d’ajouter quelque chose a notre bien-être. De même on doit, avec Jlutcheton’, rattacher le principe de la participation sympathique au bonheur des autres a ce même sens moral admis par ce philosophe. (N. de K.)

1. Ilut-heson (né en 1691, professeur à Glasgow) admet un sens moral sur lequel repose le jugement moral, comme le jugement esthétique repose sur un sens particulier.

particulier. ce sens moral n’est pas suflisant pour nous déterminer a l’action. Pour agir il faut l’appoint d’autres sentiments, comme la sympathie.