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DEUXIÈME SECTION


notre personne. En les négligeant, nous pourrons sans doute respecter le devoir de conserver l’humanité, conçue comme fin en soi, mais non celui de développer l’accomplissement de celte fin.

En quatrième lieu, en ce qui concerne le devoir méritoire envers autrui, nous savons que la fin naturelle que poursuivent tous les hommes esl leur propre bonheur. Or l’humanité pourrait à vrai dire subsister si personne ne travaillait au bonheur « les autres, à la condition de ne porter aucune atteinte intentionnelle à ce bonheur. Mais si chacun ne s’efforçait’pas do contribuer autant qu’il le peut aux fins « lèses semblables, l’accord d’une telle conduite avec l’idée de l’humanité comme fin en soi sérail seulement’négative et non positive. Car si un sujet est fin en soi, l’idée de celte finalité ne peut acquérir en moi toute son efficacité que si les fins « le ce sujet deviennent autant que possible les miennes*.

Ce principe suivant lequel l’humanité et toute nature raisonnable en général sont conçues comme fins en soi (el là est— la condition suprême qui limite la liberté des actes de chaque homme), ce principe n’est pas emprunté à l’expérience, d’abord parce qu’il est universel ; il s’applique en’.effet à tous les êtres raisonnables, or aucune expérience ne suffit à légitimer un tel caractère ? en second lieu parce qu’il nous fail voir dans l’humanité non pas une fin purement humaine (subjective), c’est-àdire un objet qu’en fait on prend comme fin, mais une fin objective que nous nous représentons, quelles que puissent être nos lins particulières, comme une loi ou condition suprême, limitant toulcs les fins subjectives.

1. Si je me pénètre de l’idée de l’humanité lin en soi, je ne peux pas me contenter de ne pas porter atteint.’à la personne humaine chez autrui, je dois renoncer à me séparer du reste de l’humanité et m’elforcer de concevoir l’identité des fins des autres hommes avec

les miennes. Kant dit dans la Doctrine de la verlu, livre 11, ch. i" : du Devoir de bienfaisance : Etant tous hommes, nous devons tous nous considérer comme des êtres raisonnables réunis par la nature dans une demeure unique, pour nous aider réciproquement.