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DE LA MÉTAPHYSIQUE DES MŒURS


appartient comme chef, lorsqu’il n’est soumis, comme législateur, à aucune volonté étrangère.

L’être raisonnable doit toujours se considérer comme législateur dans un règne des fins rendu possible par la liberté de sa volonté, qu’il y soit membre ou chef. Mais les maximes de sa volonté ne suffisent pas pour lui donner le droit de revendiquer ce dernier rang ; il faut pour cela qu’il soit parfaitement indépendant, exempt de tout besoin, et que son pouvoir soit, sans aucune restriction, adéquat à sa volonté.

La moralité consiste donc dans le rapport de toute action à la législation qui seule peut rendre possible un règne dés fins. Cette législation doit se trouver en tout être raisonnable, et émaner de sa volonté, dont le principe est d’agir toujours d’après une maxime qu’on puisse regarder sans contradiction comme une loi universelle, c’est-à-dire de telle sorte que la volonté puisse se considérer elle-même comme dictant par ses maximes des lois universelles. Que si les maximes ne sont pas déjà, par leur nature même, nécessairement conformes à ce principe objectif des êtres raisonnables, considérés comme dictant des lois universelles, la nécessité d’agir conformément à ce principe prend alors le nom de contrainte pratique, c’est-à-dire de devoir. Le devoir ne s’adresse pas au chef dans le règne des fins, mais à chacun de ses membres, et à tous au même degré.

La nécessité pratique d’agir conformément à ce principe, c’est-à-dire le devoir, ne repose pas sur des sentiments, des penchants et des inclinations, mais